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Le journal Off du poker

[Journal off du poker – 20 décembre] La triche, c’est les autres

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Et si tout n’était qu’illusion ? Faux-semblant, biais cognitif et autres volatile sensation d’irréalité ? A Vegas, plus que jamais, on ment frontalement, effrontément : les casinos ne sont que luxe et volupté, jusqu’à ce que vous passiez dans leurs arrières-cours ; les étudiantes en droit en Californie ne sont pas des professionnelles de l’escorting, jusqu’à ce qu’elles vous déroulent le menu de l’amour avec un grand sourire ; l’addition est raisonnable, jusqu’à ce que vous rajoutiez, taxes, gratuitytips et autres inventions locales ; les idoles de l’histoire de la ville sont d’honnêtes pères de famille, jusqu’à ce que Benny Binion voit son casier judiciaire dévoilé ou que le fiancé de l’Amérique, Liberace, vive enfin son homosexualité au grand jour.

A Las Vegas, il n’y a pas de hasard, et c’est bien pour cela que les magiciens en ont fait leur ville d’élection. Des stars y sont devenus multi-millionaires, comme David Copperfield, d’autres ont vivoté, en quête d’une gloire qui n’arrivera jamais. Ils sont nombreux, les manipulateurs de cartes et autres professionnels du close-up à avoir vu leurs rêves s’évaporer en même temps que l’eau des arroyos de la ville. Alors on s’invente des vies, de grands projets, des rêves d’ailleurs. Des illusions, des fuites en avant : un projet avec Spielberg ? Une liaison avec une star d’Hollywood ? Un magicien français qui traînaît beaucoup dans les années 2010 avec les pros du poker était devenu un As à ce petit jeu de mensonges de faux-semblants. La dernière fois où je l’ai croisé dans les avenues de Vegas, il sortait d’une petit maison en stuc blanchâtre, où il vivait en colocation, et s’apprêtait à faire sa promotion sur le Strip au volant d’un camion de location.

Des magiciens. Des menteurs. Des tricheurs. C’est tous ces anathèmes que l’on a servi à une figure hexagonale de la première vague post-boom poker, en la personne d’Arnaud Mattern. L’homme a un capital sympathie immédiat, il a connu bien des sponsors —Winamax, PokerStars— et laisse un bon souvenir derrière lui, parmi les « professionnels de la profession ». On l’a connu joueur de backgammon, grinder de poker. On le redécouvre croupier, dans de grosses parties privées, et accusé d’être l’un des artisans, aux USA, d’une gigantesque arnaque à coup de parties truquées, cartes marquées et autres manipulation. Alors on s’invective, entre whales multi-millionaires présentes à ces parties hors des clous de la loi, car c’est bien connu : l’enfer de la triche, c’est les autres.

L’autre a tous les patronymes, toutes les identités du monde : Martin Kabrhel, un très agaçant joueur high-stakes, en a fait les frais récemment. Cet adepte du trash-talk permanent, qui confine parfois à quelques légers troubles autistiques, a été accusé par ses partenaires de grosses parties de marquer les cartes, et d’analyser ainsi tout le jeu distribué. Pendant une semaine, tout le monde ne parlait que de ça. Six mois plus tard, il est à la même table que ses contempteurs dans le One Drop à 1 000 000$, sans que cela ne gêne plus personne. Un journaliste étranger me confiait, entre deux coups, que c’est le profil du joueur qui avait attiré l’attention : « Kabrhel est stacké par un riche homme d’affaire tchèque qui a fait sa fortune de façon nébuleuse, comme souvent dans ce milieu. Et comme il fait tilter tous les autres en leur tapant sur les nerfs, le raccourci a été vite fait, mais il n’y a jamais eu aucune preuve contre lui… »

A un connaisseur du milieu du jeu depuis bien des décennies à qui l’on évoquait toutes ces affaires, on ne recevait pour toute réponse qu’une statistique au doigt mouillé : « si tu regardes bien, entre les mecs qui se chipdumpent des jetons dans les tournois, les groupes de grinders en ligne qui font de la collusion, et je te passe les méthodes plus abouties, tu n’as pas plus de 70% de joueurs honnêtes au final… » Même les légendes comme Doyle Brunson ont eu droit à leurs rumeurs, notamment à une époque où il avait tout raflé au PLO au Big Game, dans un style de jeu qu’il ne pratiquait jamais autrement. Un autre, sur le même sujet : « On aura beau dire, le poker est un jeu, et ça porte bien son nom. L’idée, c’est d’avoir un edge, et parfois, la fin justifie les moyens. »

Derrière ses lunettes Aviator fumées, avec sa barbe de trois jours, Arnaud Mattern, alors surnommé dans ces parties privées « Mike The Magician » par ses accusateurs, a tout du coupable idéal. Il faut dire que, comme quelques uns, il traîne lui aussi son lot de casseroles et rumeurs jamais avérées. La partie privée des « Entrams », un groupe d’amateurs parisiens aisés, où on l’aurait pris la main dans le sac —ou plutôt, la carte dans la manche ? Une accusation sans fondement, dû à une dette de prêt qu’on ne lui aurait pas payée. Son passé de magicien ? Il aime les cartes, oui, et alors ? L’excellente interview de notre confrères de Club Poker n’aborde pas une autre des rumeurs maintes fois croisées dans le milieu : alors croupier associé à un joueur complice dans un casino français, il aurait « fait le jeu » jusqu’à décrocher le jackpot à table. La vidéo parlerait d’elle-même, selon les témoins qui l’auraient vue ; mais la vérité, c’est qu’à part bannir Mattern du casino, aucune poursuite en justice n’a été actée, bien des années plus tard.

Serait-on toujours le tricheur d’un autre ? Le béat naïf qui a trop voulu croire aux belles histoires ? C’est bien là le talent de l’arnaqueur et de l’illusioniste : créer ce que l’autre a envie de voir, agiter devant les pupilles écarquillées une projection qui n’existe que dans les yeux de son prochain. Tricher, finalement, c’est aussi donner matière à rêve, même si tout finit par se payer.

Jérôme Schmidt

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[Finale WiPT] L’union fait la force

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Il faut croire que la devise ne sied pas qu’aux pays qui l’ont officiellement adoptée (Andorre, Angola, Belgique, Bolivie, Bulgari, Géorgie, Haïti et Malaisie) : au poker aussi, l’union fait la force. C’est en tout cas l’évidence qui s’impose lorsqu’hier, au lancement des derniers Day 1, trois figures du poker hexagonal sont montées sur scène, scellant ainsi une alliance que beaucoup n’auraient jamais imaginée il y a encore quelques années : Matthieu Duran (Live Event directeur de Winamax), Patrick Partouche (des casinos du même nom) et Apo Chantzis (Texapoker).

Alors que des secousses avaient mis de la friture sur la ligne de la relation Winamax-Partouche il y a plusieurs années, il fallait bien tout le savoir-faire et le talent naturel d’Apo Chantzis, fort de ses équipes et son maillage extraordinaire sur tout le territoire, pour mettre tout le monde autour d’une même table, et arriver à sceller un destin commun. Hier, leur présence à trois sur la grande estrade du Pasino Grand d’Aix-en-Provence était à la fois le symbole d’une industrie pacifiée, qui travaille désormais main dans la main, et d’une victoire médiatique, devant ce qui allait devenir le plus grand field d’une finale du Winamax Poker Tour.

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[Finale WiPT — Journal Off] Moi y’en a vouloir des sous

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Petit à petit, le field se rapproche « de l’argent ». Une obsession pour ces milliers de joueuses et joueurs qui se déplacent parfois depuis l’autre bout de la France afin de s’offrir un shot au prizepool juteux proposé par ce tournoi à seulement 500€ ? Pas certain, ou en tout cas, pas obligatoirement pour tout le monde. L’obsessions d’entrer dans l’argent (souvent pour un gain marginal, à moins d’atteindre le Top 20 du tournoi, surtout lorsqu’on a mis plusieurs bullets dans le tournoi, jusqu’à sept pour les plus opiniâtres) relève plus du défi personnel —inscrire sa première ou son énième ligne HendonMob, raconter à ses amis son run avant son badbeat qui met une halte définitive à tout rêve d’argent et de gloire— que d’un plan de carrière. Les pros, on le sait, sont de moins en moins présents dans les fields de poker, ce jeu de hasard et de talent (dans l’ordre inversé) étant devenu pour beaucoup un loisir, une récréation, une parenthèse qu’il faut garder enchantée.

Rien de plus frustrant pour un joueur, en effet, que de ne pouvoir jouer ; au piquet, pour celui qui s’interdit de jeu comme pour celui qui y est tricard du boléro. En montant le long escalator qui amène au premier étage du Pasino Grand d’Aix-en-Provence, on glisse lentement, dans le brouhaha des jetons et des files de joueurs en attente d’un siège, au beau milieu des fanions qui ornent les murs, célébrant vainqueurs et héros du Winamax Poker Tour au fil des années. Parmi les visages en gros plan, cadrés serrés, une seule photo de groupe : celle de la « Team Big Roger », victorieuse en 2013 du seul tournoi par équipe proposé lors de ces festivals. Sur l’affiche, trois visages souriants, ceux de Stéphane Bazin (depuis très rare sur le circuit poker), Antonin Teisseire (omniprésent lors des tournois du sud-est de la France et sur le circuit Partouche) et Roger « Big » Hairabedian. Ce dernier, nous en avons déjà parlé in extenso lors d’une plongée tête la première dans son éternelle télé-(ir)réalité qu’il autoproduit chaque jour ses réseaux sociaux, annonce son éternel come-back. Mais ses courbes émotionnelles, tout aussi ascendantes que descendantes, ont rendu l’opération de plus en plus délicate. Chaque espoir s’ouvre teinté d’une seule crainte pour l’observateur empathique : que rien ne voie le jour, que tout s’effondre avant d’avoir été monté, voire simplement esquissé.

On ne croisera pas Roger Hairabedian à Aix-en-Provence au WiPT 2025. Contempteur du online, ce n’est pas pour cette raison qu’il aura décidé de skip un large field comme il les aime ; il est tout bêtement interdit de tous les casinos Partouche. L’homme a du talent —il en a toujours eu et, peu importe les années qui passent, il sait signer quelques places dans les casinos qui l’accueillent encore, comme le Circus à Paris— mais aussi celui de se mettre à dos la terre entière, avec quelques obsessions à la clé en sus. On ne sait jamais vraiment, dans les nébuleux rebondissements qui peuplent ses dérives intimes, quelles sont les véritables raisons de ces interdictions de casino, fâcheries diverses et vendetta en ligne. Peut-être, finalement, n’est-ce d’ailleurs pas la question principale…

« Les centaines de choses que l’on a faites de travers dans la vie. Pas forcément à dessein : elles ont pu se produire par stupidité, maladresse, inconscience, par mégarde, pure connerie, sans arrière-pensée« , lisait-on justement à quelques minutes du coup d’envoi du Day 1E en incipit d’un roman sublime, Jours blancs (Jeroen Brouwers, 2013), sous le regard étincelant du Big Roger gagnant d’il y a une décennie. Le regard, depuis, s’est fait plus dur —parfois lucide, parfois désespéré, souvent encore joueur. « Il arrive qu’un souvenir insupportable s’en échappe, et pénètre soudain votre cerveau, pareil à un cambrioleur qui vous jette une corde à piano autour du cour, et nous serre la gorge. » Le souvenir de la victoire, de la gloire et de l’argent étrange ainsi au quotidien ceux qui ont connu de telles cimes ; la respiration de ce millier d’anonymes qui se presse sur l’escalator menant à la table de tournoi n »est que régularité et stress positif.

Que faire, lorsqu’on ne peut plus jouer ? Lorsqu’on vit à distance les grands évènements sans, parfois, ne pouvoir y participer ? A l’époque de champions sublimes comme Stu Ungar, c’était la brokitude qui interdisait toute action. Dans sa biographie, écrite par Nolan Dalla (Joueur né, 2008), l’ancien champion du monde tourne en rond, imaginant les caves s’envoyer en l’air pendant que lui rumine dans sa chambre d’hôtel miteuse du Gold Coast, à Las Vegas. En 2025, Roger Hairabedian a inventé d’autres expédients, intronisant à quelques semaines des grandes compétitions de l’année (WiPT, WSOPC, WSOP Vegas) une joueuse inconnue, Céline « Douceur » Beauchamp, 716$ au compteur de sa page HendonMob. Aux antipodes, donc, de Roger Hairabedian, 11ème joueur all time français et ses quelques 5 500 000$ de gain. On imagine, assez simplement, un contral moral de stacking avec celle qu’il estime « prête à faire de grandes choses dans le poker », sans en connaître plus de détails.

A la hargne et la grinta du parrain Hairabedian, succèderait donc la « douceur » de sa néo-protégée, Céline Beauchamp, qui a cette double tâche muette d’adoucir l’image du mentor et d’aller chercher la gagne là où les portes lui sont désormais fermées. Croisée par hasard à table lors du Day 1C de la finale du WiPT, on ne lui aura pas porté chance, puisqu’elle va sauter quelques secondes plus tard du tournoi principal. Si l’argent et la gloire médiatique sont au choix les deux mamelles qui sous-tendent le monde depuis l’époque pas si révolue de Jean Yanne (pour les plus jeunes, réalisateur & acteur anar-libertarien des années soixante), vivre par procuration le jeu, ses frissons et ses enjeux narcissiques, semble relever d’un lent supplice qu’on ne saurait conseiller à ses pires ennemis. Comment continuer à être, lorsqu’on a été ? Parmi la foule qui s’amasse au fur et à mesure que nous écrivons ces lignes, il y a sûrement dans cet horizon de rêves flottants au-dessus de chaque siège bien des nuances de fantasmes : l’action, le fun, la légende, la victoire et même la perte. Rien ne va plus, faites vos jeux.

(photo : Jules Pochy)

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[WPO Bratislava – journal off] L’odeur du tabac froid

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Il n’y a pas que la victoire dans la vie. Pas que le rush d’adrénaline de la river miraculeuse, la douce euphorie des triomphes annoncés que rien ne vient trahir. Pas que les billets qui passent de main en main pour finir dans sa poche, pas que les trophées à empiler, les credit-card roulettes jamais perdues, les regards empreints d’admiration, les amitiés nouvelles et éphémères. Il y a la défaite, aussi. La solitude d’un casino à 8h du matin, en pleine semaine, quand les petits-déjeuners offerts par l’établissement sont autant d’incitation à rester encore un peu, histoire de se refaire, de ne pas affronter le ciel grisâtre qui a englouti la ville, ne pas croiser son regard dans les miroirs fumés des couloirs qui amènent vers la sortie.

En arrivant trop tôt ce matin au casino Bratislava, la ferveur de 23h59 s’est éclipsée depuis quelques heures. Les vainqueurs, eux, dorment du sommeil de ceux qui ont vu juste. Ne restent que les joueurs, les vrais joueur, ceux qui se fichent bien de gagner et de décaver. Le parfum capiteux qui flotte dans les casinos et les clubs de jeux du monde entier (une amie, ancienne responsable d’un cercle de jeu parisien, m’avait un jour confié que cette odeur si typique aux établissements de jeux, constituait pour elle une madeleine de Proust olfactive, comme l’odeur du poulet dominical, qui la réconfortait immédiatement, par habitude) a depuis longtemps été dissipé par l’odeur du tabac froid. Au sous-sol, machines à sous sous la forme modernes, roulettes électroniques ou avec  croupier et tables de blackjack accueillent une dizaine d’irréductibles. Des joueurs locaux, habitués de ces wee hours où l’on joue par habitude, manque d’envie, voire lassitude. C’est l’illustration presque plastique de la grande théorie psychanalytique du joueur pathologique : il préfère perdre, afin d’avoir une raison de se plaindre —et donc d’être écouté, réconforté, materné.

La gagne, la ouinne, n’est pourtant pas interdite. Au hasard d’un billet de 50 € transformé en quelques minutes en plusieurs billets verts, on se découvre repartir les poches pleines, laissant derrière nous, très vite, le tabac froid, les mines grises, les cafés tièdes du buffet, les roulettes qui tournent dans le vide. A l’étage, les tournois de poker n’ont pas encore repris. Il faudra attendre midi, et l’arrivée d’une flopée de WIP (icônes télévisuelles, influenceurs, sportifs, etc.) ainsi que de joueurs pros pour que la fête reprenne et puisse battre son plein. Et là, peu importe la gagne tant qu’il y a le fun.

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