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Le journal Off du poker

[Journal Off des WSOP #2] : Almost Hellmuth

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Le Razz, Phil Hellmuth connaît. Et lorsque le premier tournoi de cette variante a débuté il y a quelques jours lors des World Series, le sang du « Poker Brat » n’a fait qu’un tour. Qu’importe le buy-in (1 500$ seulement), pourvu qu’on ait l’action, le frisson du bracelet qui se profile à l’horizon. Et cette année, tout comme en 2011, juteuse année de l’échec pour le joueur américain, commencera donc par une décevante seconde place. Il y a trois ans, Hellmuth a ainsi signé trois places de runner-up (dont la pire, lors du tournoi à 50 000$, pour plus d’un million de dollars de gains…), signé sa plus rentable des sessions WSOP mais aussi sa plus déceptive.

En ce tournoi de Razz des WSOP 2014, c’est contre le mur érigé par Ted Forrest que Phil Hellmuth s’est brisé. Ultra chipleader à trois joueurs restants, Hellmuth aura pourtant entamé le heads-up en tête et lâché peu de terrain à Forrest, ne cédant son avance que quelques minutes avant le dinner-break. Mais à ce moment du tournoi, avec les limites de mises qui tutoient les sommets, les joueurs n’ont que quelques coups en manche, dans un jeu à tirage qui peut vite coûter cher… Ce qu’Hellmuth cherchait, bien évidemment, n’était ni les 120 000$ réservés au gagnant ou les 70 000$ du runner-up : non, la course au bracelet venait d’être lancée pour le recordman toutes catégories, qui en compte déjà treize au compteur.

Forrest n’est pas un étranger pour Hellmuth : détenteur de trois bracelets, il fait partie de cette génération old-school de joueurs made in USA. Pendant un temps, même, il aura servi de backer à Hellmuth, finançant les tournois du jeune champion en devenir. Habitué des plus hautes limites (il a « servi » dans l’équipe jouant contre le milliardaire Andy Beal, « The Team », où les blindes sont allées jusqu’à 100 000/200 000$ en heads-up), il connaît le Stud et le Razz comme sa poche (premier bracelet en 1993), et ne connaît plus depuis longtemps la pression de la compétition. Déçu, ou presque, Forrest à la fin : si Hellmuth avait remporté son quatorzième bracelet, il serait plus encore entré dans l’histoire. Mais l’été est long, et le Brat infatigable.

Jerome Schmidt

(crédit photo : WSOP.com)

BONUS : un entretien effectué pour Poker52 il y a un an et demi, après sa victoire aux WSOPE à Cannes

A quel point votre titre de plus jeune champion du monde en 1999 a changé votre vie ?

J’ai commencé par acheter un magnifique condo à Madison dans le Wisconsin, face à l’eau, avec même une mare à canards ! Je l’ai payé cash, en une fois, je n’en revenais pas… Puis j’ai acheté une Cadillac, un truc de conservateur américain ! (rires) Et quelques mois plus tard, je suis passé aux Porsche… Au départ, j’ai gagné pas mal en notoriété, mais cela n’a rien à voir avec ce qui se passe maintenant, avec la télévision et internet…

Vous n’avez pas tout flambé en quelques semaines ?

J’ai du en reverser pas mal, c’est vrai (rires) ! Mais heureusement, j’ai acheté des choses en « dur » et j’ai mis de côté 150 000$ pour mes impôts. En 1990, au mois d’avril, lorsqu’il a fallu payer le gouvernement, je ne me suis pas retrouvé broke, mais il ne me restait plus que 20 000$ en cash, en plus de l’appartement et de la voiture. Mais pour un gamin de 24 ans, je trouve que j’ai été assez raisonnable, je ne me suis pas endetté au moins.

Etait-ce votre plus belle victoire ?

C’était tout simplement extraordinaire. Mon père détestait que je joue au poker et il était venu me soutenir en table finale, pour me montrer qu’il croyait en moi. C’était la première fois, et je gagne le Main Event ! Je me souviens parfaitement de la dernière carte : j’ai les bras en l’air, tout semble au ralenti, je serre le poing, et je tourne la tête, mon père court vers moi, il est arrêté par la sécurité, mais je hurle pour qu’ils le laissent passer, et nous finissons dans les bras l’un de l’autre. Le lendemain, je lui ai acheté une Mercedes, et depuis, il n’est jamais plaint que je joue au poker ! (rires)

Qui étaient vos idoles lors de vos débuts dans le poker ?

Je vénérais un type du nom de Jack Keller, champion du monde 1984, un ancien pilote de l’US Navy, qui était toujours accompagné de sa femme à chaque tournoi. Il avait également gagné deux titres du SuperBowl of Poker. Il était très bon en Limit Hold’Em, en tournoi et en cash-game. Il était un exemple pour moi, tout comme mon père, qui avait réussi à construire un couple aussi solide. Il a toujours été l’exact opposé du « Poker Brat » ! (rires)

Quelle a été votre premier partie de poker ?

J’ai du toucher ma première main de poker à 20 ans : il y avait une partie dans mon université du Wisconsin. J’ai perdu les deux premières fois, emprunté 100$, les ai reperdu, donné mon permis de conduire en gage contre 100 dollars en plus puis gagné 500$ à la troisième reprise. Pendant deux mois, j’ai travaillé dans les champs, à ramasser des pierres, pour me payer mes parties de poker. Je passais mes journées sous le soleil brûlant, et j’allais les rejouer au poker le soir. Je me suis mis à penser, boire, manger et dormir « poker ». J’ai ensuite commencé à bien gagner, puis me suis invité à une énorme partie de notables à Madison, Wisconsin, contre les médecins et les avocats du coin. Je les ai rasés, littéralement. A 21 ans, dès que j’ai pu, j’ai conduit jusque Las Vegas, et j’ai fait une véritable traversée du désert à table : perdu, perdu, perdu, perdu. Au bout de neuf voyages, je me suis mis à gagner. A l’époque, tous les champions des petites villes américaines se retrouvaient à Las Vegas pour se mesurer entre eux. Internet n’existait pas, et il fallait aller à Vegas pour s’améliorer. Dix voyages, et j’étais lancé…

Lors des WSOP 2011, vous avez manqué à plusieurs reprises un nouveau bracelet. Comment avez-vous vécu ces places de runner-up à répétition ?

Le plus dur a été ma seconde place lors de l’épreuve de Deuce-to-seven. J’avais déjà été dans la même situation, dans le même tournoi, en 1993, contre Billy Baxter. Nous sommes à tapis, et Baxter cherche une carte pour battre mon « pat 10 », et il touche sa carte miracle, puis arrive à revenir et prendre le titre. J’ai fait tellement de tables finales ensuite, mais on ne s’en rend pas compte car si ce n’est pas une place payée, ce n’est pas comptabilisé. Une fois également, à tapis à 4 joueurs, je joue toutes les cartes, sauf un seul 2, et mon adversaire le touche ; Huck Seed, dans la même situation, me bats sur un tirage incroyable. Cette année, lorsque John Juanda refait son retard et me bats, je suis sorti essoré, lessivé, dévasté. J’avais ce bracelet au bout de la main et il m’a échappé… Je suis parti à l’hôtel Aria, me suis assis au bar pour boire des Scotch. J’ai fait des cauchemars incroyables, alcoolisés, puis j’ai été m’asseoir à une grosse table où j’ai gagné 30 000$. J’ai refait le match pendant trois jours : aurais-je du payer ? aurais-je du relancer ? et si une autre carte était tombée ? Mon autre seconde place, lors du Stud-8, n’était pas si difficile, alors que j’ai longtemps été chipleader. A 7 joueurs restants, je ne pensais même pas survivre. Puis à trois joueurs, j’ai perdu un pot scoopé qui m’a fait très mal, mais je n’étais pas aussi à l’aise que dans le Deuce-to-sevent. La troisième seconde place était très dure, même si je n’ai pas joué le meilleur heads-ups possible en Hold’Em. Pourtant, j’ai perdu un pot à tapis où j’étais 84% devant, et, pareil, j’aurais gagné le plus beau tournoi au monde ! J’ai étonnamment manqué d’expérience en Hold’Em car ces dernières années, je m’étais laissé aller sur cette variante. Ce qui était très positif, c’est que 99% des gens étaient pour moi, car je m’étais bien conduit lors des derniers échecs : pour la première fois de ma vie, les gens étaient de mon côté, et c’était un sentiment incroyable. Lorsque j’ai sauté en deuxième place, j’ai essayé de rester classe, de serrer les mains de tout le monde, de répondre aux interviews… Mais, bon, j’ai tout de même fini la nuit au bar…

Pensiez-vous que les gens pouvaient autant vous aimer ?

L’an dernier, lors des dinner-breaks, la structure était si lente que je partais dîner pendant 2h30, je buvais de l’alcool, et je revenais dans un état pas toujours recommandable. Cette année, j’étais tellement concentré que je repartais avec ma femme dans ma chambre à l’Aria, je mangeais rapidement, puis je faisais une sieste. J’étais venu si déterminé… Même après l’élimination, je ne pensais qu’à la stratégie, pas au désespoir. Après ma deuxième seconde place, les gens venaient me voir : « Tu t’es hyper bien tenu, Phil, c’est génial ! » Et moi, j’étais très étonné : « Ah vraiment ? » Je ne réalisais pas la différence. Tout le monde m’assurait que si, qu’ils étaient de mon côté… J’ai compris qu’il était temps de grandir un jour ou l’autre, que même si j’étais dégoûté, il fallait se contenir. Le tournoi 8-game à 50 000$, c’était un tel rêve, je le touchais des doigts, c’était une sensation incroyable.

Les WSOP sont-elles la seule et unique Mecque du poker ?

Je suis venu la première fois en 1988, où j’ai fini en cinquième place d’un tournoi Stud 8-or-better. Puis j’ai fait mon premier Main Event, où j’ai pris le chiplead rapidement. Je me suis retrouvé face à Johnny Chan, à qui j’ai voulu placer un énorme bluff. Il m’a payé, et j’ai sauté 33ème. A ce moment, j’ai su que mon but dans la vie était de gagner ce Main Event. Je l’ai fait l’année suivante. J’ai réalisé tous mes rêves grâce à ce moment incroyable de 1989…

Où préférez-vous jouer au poker ?

La nouvelle salle de poker du casino Aria à Las Vegas est proprement géniale : très bon service à table, confort maximal et de très belles parties, dont du poker chinois open-face, qui est une variante qui permet de se détendre entre des variantes plus compliquées. C’est un casino vraiment moderne, grand luxe, et qui sait prendre soin de ses clients. Autrement, j’aime toujours autant boire un cognac et jouer à l’Aviation Club de France, qui est un cercle mythique, ou m’arrêter à Malte, qui est une île magnifique.

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[Journal Off des WSOP – 2 juillet] Et au 17ème bracelet, il se révéla

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Il y a ces joueurs que beaucoup s’évertuent à détester ou critiquer, mais qui forcent le respect et l’élan amical avec le temps. Phil Hellmuth est l’un d’eux, à la fois GOAT (Greatest Of All Time) du poker de tournoi et scapegoat (bouc émissaire) de la communauté américaine du poker pro et semi-pro. Les amateurs, eux, ne s’y sont pas trompés : il est celui qui les fait vibrer depuis des années, de la grande époque du Binion’s aux nouvelles légendes qui s’écrivent sur le Strip, au Horseshoe situé face au Bellagio. Les cohortes de fans se pressent pour lui demander un selfie personnalisé, nouvel avatar des photos dédicacées cheesy des années quatre-vingt.

Chaque été, Phil Hellmuth positive, puisque c’est désormais son leitmotiv, depuis notamment un livre en guise de manuel de self-improvement où il consacre la positivité en art de vivre, quitte à parfois en faire bien trop sur le sujet. Mais l’homme, derrière les rants et les éruptions de colère qui échappent même au personnage qu’il s’est créé de « Poker Brat », a su intimement rester lui-même : le marketing, chez lui, est surfaciel, comme si son humanité dépassait les vagues tentatives de branding qu’il agite sur les réseaux sociaux (boisson énergisante, shitcoin, hotel casino de Las Vegas, opérateur en ligne… tout y est passé).

Hellmuth aime le poker, il est le poker. Un poker made in America hérité des grandes années pré-Moneymaker, cette époque où les personnages, comme au catch, créés pour les tables télévisées sont devenus des american hero. Simples à comprendre, faciles à anticiper dans leurs réactions, et toujours le coeur sur la main. Il y a le Kid (Negreanu) qui babille sans cesse et sait lire dans les âmes ; le Great Dane (Gus Hansen), qui fait tomber les filles entre deux bluffs improbables, avachi à table ; le sportif glacial (Patrik Antonius) venu de contrées glaciales ; le post-soviétique éruptif (Tony G) qui chambre et agresse ses adversaires ; le Texan, l’intello juif new-yorkais, la bimbo, etc.

Mais ce 2 juillet 2023, Hellmuth n’était plus le Brat, ce pénible grand gaillard en survêtement inamovible de quasi mafieux italien (on pense au New Jersey et ses personnages à la Soprano, tous vêtus de track suits) ; il est le jeune homme qui remportait, les yeux écarquillés son premier bracelet, il y a des décennies en 1989, devenant le plus jeune champion du monde, à 24 ans. 34 ans plus tard, il rafle la mise dans l’un de ces nouveaux tournois ultra-rapides créés par les World Series : un 10 000$ Super Turbo joué en une seule journée. 642 entrées, 800 000$ à la gagne. Et c’est Hellmuth, au même regard ébahi, qui entre une fois de plus dans l’histoire. Au 17ème bracelet accumulé, même ses habituels détracteurs ne peuvent qu’observer quelques minutes de silence : Hellmuth force le respect.

 

 

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[Journal Off des WSOP — 20 juin] Au ban des tricheurs

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Les journées des WSOP se suivent, et se ressemblent parfois. Mais à évènement exceptionnel —un Super High Roller à 250 000$—, shitstorm hors norme oblige. Le « lanceur d’alerte » n’est autre qu’un certain Andrew Robl, joueur high-stakes devant l’éternel, qui allume la mèche alors que le tournoi vient tout juste de commencer : Martin Kabrhel, l’un des joueurs les plus agaçants du circuit, marquerait les cartes lors des compétitions. A l’ancienne : une technique vieille comme le monde que les renards des anciens cercles parisiens ou les sharks des parties de Vegas connaissent par coeur. Une accusation, aussi, vieille comme le monde puisque certains se souviendront que de telles rumeurs couraient déjà sur les parties high-stakes du Dunes puis du Big Game, envers Chip Reese, Amarillo Slim, Puggy Pearson et Doyle Brunson. A l’époque, le « lanceur d’alerte » était un obscur joueur américain qui inondait les forums BBS « rec.gambling » de ses dénonciations jamais véritablement prouvées ni avérées.

Mais dans ce genre de procès médiatique, tout se joue désormais en temps réel, via Twitter. Et la voix de celui qui porte le premier coup —Andrew Robl, donc— compte pour beaucoup dans la crédibilité que l’on peut porter à de telles accusations. Alors que Kabrhel est encore en course dans le 250K, qu’il élimine le paisible Dan Smith, provoquant la colère de ce dernier devant les caméras de PokerGo, les accusations en tricherie fleurissent de plusieurs comptes (Tom Dwan, Galfond, le ‘revenant’ Hugo Lemaire) : oui, Kabrhel triche, marque les cartes en les grattant ou en les « collant » du bout des doigts, et tout le monde le sait depuis bien longtemps dans la communauté. Alors, pourquoi n’avoir jamais rien dit avant ? Certains avancent, complot à l’appui, que ce joueur tchèque habitué des grosses parties du Kings à Rozvadov multiplie les extravagances à table afin de masquer ses tricheries. Tous les joueurs contactés sont, au moins, à l’unisson sur un point : la conduite de table de Kabrehl est insupportable, agressant verbalement les autres joueurs à table, ricanant, se moquant avec flagornerie et cynisme. Tout sauf de la « poker etiquette », même s’il n’est pas le seul à avoir cédé à ce genre de facilités. Et si, suggèrent certain, tout cela n’était pas uniquement du metagame utilisé afin de faire tilter ses adversaires sur le long terme ?

Comme à chaque fois dans ce genre d’affaires, les « vidéos qui prouvent le délit » apparaissent. Tout au plus des clips durant quelques secondes qui montrent en effet Kabrhel en train de frotter une carte. Et alors ? Où sont donc passées ces cartes souillées ? Pourquoi ne pas avoir fait d’enquête depuis tout ce temps si cela était avéré, comme Robl et consorts le disent sans ambage ? Kabrehl se défend, après avoir sauté du 250k (ou, s’être fait éliminé à escient, selon ses détracteurs) : son comportement, quasi-autistique (on imagine en effet assez bien son attitude comme relevant d’un véritable trouble du comportement), n’a rien à voir avec de la triche. Et il poursuivra en diffamation toute personne affirmant le contraire. L’habituel ballet de la dénonce et de la menace de la diffamation peut ainsi démarrer, n’apportant sûrement au final aucune preuve, juste des suspicions plus ou mons étayées car, au final, ceux qui veulent y croire, y croiront toujours. Seuls les imbéciles semblent changer d’avis.

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[Journal Off des WSOP — 12 juin] La revanche des masques

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Parce qu’il n’a pas de place pour la nuance, pas plus que pour l’ironie, les interactions sociales semblent régies par une logique de polémiques intenses en un espace temps-poisson rouge : ce qui choque un jour sera oublié le lendemain, mais pourra revenir de façon encore plus hystérisée dans quelques mois. Le feu aux poudres, cette fois, a été déclenché involontairement par Isaac Haxton, lors de sa victoire haut la main du 25 000$ 8-handed, pour près d’1 700 000$. Un premier bracelet pour celui que beaucoup surnommaient « le meilleur d’entre nous sans bracelet WSOP », et la confirmation que 2023 est une année spéciale pour Haxton, de retour au meilleur de sa forme. Pourtant, sa victoire fait « débat » sur le poker-twitter américain : non content d’atteindre les quelques 35 millions de gains en tournois, Haxton a osé dominer le tournoi avec un masque N95 sur le visage. Comme un crachat à la figure des anti-masques, un affront que peu lui pardonnent.

Leur cause est entendue, et aucun débat serein ne saurait être mené : Haxton est un imbécile qui touche des jetons mais porte un masque à chaque seconde du tournoi ; il n’a pas même la politesse d’enlever son masque sur les photos, ce qui choque le monde entier ; Haxton connaît peut-être les statistiques du poker, mais pas celles du COVID, etc. En réponse, Haxton s’amuse à chaque victoire en partageant les photos, invariablement masquées, de ses trophées et ses millions glanés en un seul semestre de 2023. Une posture presque politique, elle aussi, puisqu’il insiste afin de poser comme cela en « soutient à ceux qui subissent la pression publique afin de ne pas porter de masques ».

Kara Scott, l’une des figures les plus attachantes et intellectuellement brillantes du poker depuis bien des années, est l’une d’elles. Elle qui souffre de soucis de santé récurrents bataille depuis des mois déjà afin de promouvoir une extension du port de masques dans le milieu du poker, ces situations où l’on passe en intense proximité d’autres joueurs du monde entier. Son travail —présentatrice des plateaux WSOP— lui a empêché de suivre à la lettre sa recommandation, et elle a contracté le COVID lors d’un WSOP précédent. Sur Twitter, elle subit elle aussi la meute anti-masque, entre libertarisme américain forcené, complotisme-light et toujours  ce même dangereux mélange de sentiment de supériorité (je sais mieux que toi ce qui est bien) et d’infériorité (je suis mis au ban) qui créé bien des conflits internes.

Au masque comme acte politique —des deux côtés—, s’ajoute une extension du domaine de la lutte : pour les anti, Haxton n’est pas seulement un « pro-mask » honteux, il est bien évidemment un soldat dévoyé de l’idéologie woke
/ukrainienne/lgbtqi+/progressiste (barrez la mention voulue) qui concourt à amener le monde/l’Amérique droit dans le mur. Posant avec son ami Justin Bonomo (démasqué) sur l’une des photos de vainqueur, il aggrave même son cas puisque Bonomo est considéré depuis longtemps par la poker-sphère réac (Mike Matusow en tête, Ryan DePaulo « I’m not a pussy, I don’t wear a mask », etc.) comme un social justice warrior de la pire espèce. Bonomo, le même joueur qui, filmé masqué à table lors d’un tournoi high-roller WSOP osait user de l’ironie (« ils sont tous nuls à ma table, c’est agréable de jouer contre des types qui ne connaissent rien à ce jeu ») en parlant de ses adversaires multi-capés. Une ironie bien évidemment immédiatement attaquée par ses détracteurs, dont la grille de lecture prédéfinie passe au tamis de l’univocité toute déclaration. Des attitudes qui radicalisent le discours et interdisent le dialogue, comme si porter un masque (ou non) en table finale devait faire sujet de société, objet de débat enflammé et story auto-destructible sur les réseaux sociaux.

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