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Portraits / Interviews

Rencontre avec… Julien Martini

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Il y a tout juste an, nous consacrions une couverture à Julien Martini, récent détenteur d’un quatrième bracelet, aux WSOP 2022, en Championship Razz à 10 000$. Pour l’occasion, nous publions  à nouveau cet entretien in extenso de l’Ambassadeur de PMU Poker !

 

Julien Martini est un des spécialistes mondiaux de cash game en hautes limites, mais c’est son explosion en tournois ces dernières années qui l’a fait connaître aux yeux du grand public – notamment son bracelet gagné au Omaha Hi-Lo 8 or Better des WSOP 2018. Devenu un streamer régulier de la chaîne Twitch de PMU, il a mis en vente début mai sa « Méthode Cashgame » (990 euros) mise au point spécifiquement pour crusher les tables françaises online. Il a bien voulu aborder avec nous son actualité récente et les secrets de sa méthode iconoclaste.

 Est-ce que tu peux rappeler rapidement rappeler ton parcours, comment tu t’es lancé dans le poker ? Quelles sont parmi tes performances celles dont tu es le plus fier ?

J’ai commencé à jouer au poker il y a 15 ans, quand j’avais 14 ans, dans le milieu associatif, à Achères, en banlieue parisienne, au club poker 78. J’ai essayé une première expérience en tant que professionnel lorsque j’ai atteint ma majorité, qui ne s’est pas forcément bien passée. Je suis ensuite rentré dans la vie active. En 2017, je suis parti à Taïwan et j’ai fait toutes mes armes, c’était le début des solvers, j’ai été un des premiers à les utiliser et ça s’est très bien passé, j’ai eu beaucoup de réussite. Je jouais principalement en cash game. Je suis passé de tables mid stakes à des tables super high stakes en l’espace d’un an (de la 1-2 à la 100-200), c’était une sacrée ascension. En 2018, j’étais exilé à Taïwan et je voulais justifier vis-à-vis de ma famille, de mes amis, que l’argent ne tombait pas du ciel, et j’ai donc essayé de me mettre aux tournois, je me suis concentré là-dessus. J’avais comme idée de jouer les WSOP en 2018, j’ai fait un gros entraînement, j’ai eu énormément de réussite et de chance, j’ai gagné un bracelet cette année-là. J’ai été ensuite second de l’EPT national à Barcelone ; quelques mois plus tard, j’ai été second du PSPC 25K Players Championship aux Bahamas.

La crise a beaucoup changé ta pratique du jeu ?

Complètement, puisque je faisais surtout du cash game live, et là je suis passé online. Ça se passe très bien, mais c’est du changement. Le principal étant de ne pas voyager. Avant la crise, je me rendais sur 3-4 spots, Los Angeles, Las Vegas et Macao, qui sont les 3 pôles des high stakes en cash game, et de temps en temps Taïwan. Alors que là, je vis en Angleterre et je reste à la maison toute la journée.

Maintenant que tu as pratiqué extensivement les deux, est-ce que tu as une préférence entre le live et le online ?

C’est très différent. Je préfère le live parce que je trouve ça plus humain, il y a plus d’interactions sociales et ça rend le jeu plus humain aussi ; ce n’est pas que des pseudos, que des clics, on prend les jetons, on regarde l’adversaire dans les yeux, c’est une interaction. Mais je prends du plaisir aussi à jouer online, et à jouer au poker en général.

Tu es donc installé à Manchester ?

Oui, j’y vis depuis décembre 2018.

Y a-t-il une raison pour laquelle tu as préféré Manchester à Londres ? C’est à cause du football ?

Il y a une part de ça. Depuis que je suis gamin, je suis fan de United, et je me suis dit que c’était la bonne occasion. Dans le cadre de mon ancien métier, je me déplaçais beaucoup à Londres, et c’est une ville où il y a beaucoup de stress, et pour un joueur de poker, vu qu’on peut jouer n’importe où, j’avais l’impression que Manchester était le meilleur compromis pour vivre en Angleterre, et la ville est plutôt sympa.

Peux-tu nous parler de ta collaboration avec PMU ?

Je suis très content de collaborer avec PMU puisque ça me permet vraiment de diffuser des choses, de partager, mais je n’ai pas d’obligations vis-à-vis d’eux, je suis ce qu’ils appellent ambassadeur.

Tu as commencé à streamer sous l’impulsion de PMU ou tu le faisais déjà de ton côté ?

J’avais ma chaîne sur laquelle de temps en temps je streamais tard la nuit, à 3-4 heures du matin, des super high stakes, ce qui plaisait énormément aux gens. Au début j’avais 50 personnes, puis 60, 150, 200 puis 300 et j’essayais de partager le plus possible. Très rapidement, ça s’est su, et du coup des joueurs contre qui je jouais prenaient beaucoup d’informations, et j’essayais de le faire mais de manière très ponctuelle et sans forcément avertir. Là où je me suis vraiment mis à streamer plus, c’est lorsqu’on avait monté de l’argent avec Davidi Kitai et Romain Lewis pour la Fondation de France, pour aider les gens du personnel hospitalier avec un soutien psychologique, et on avait monté 6-7000 euros, et là je streamais tous les jours, de manière régulière, de 16 à 23 heures. C’était sur ma chaîne d’abord et maintenant c’est plus sur PMU.

Est-ce que tu t’imposes un certain volume de stream par rapport à ton audience ?

Pas du tout. Généralement, je commence à stream lorsque les gens me disent : ça fait longtemps, ce serait quand même cool que tu le fasses, même si avec PMU, on a essayé de mettre en place deux streams par mois au minimum, pour créer une certaine continuité, pour capitaliser sur les viewers, évidemment c’est ce qui les intéresse, et je comprends ça. C’est un rythme qui me va parfaitement.

Est-ce que tu considères que ça a une influence sur ton jeu ? Sur ta concentration ?

Bien sûr, quand je ne streame pas, je joue entre 8 et 12 tables, focus à fond, et rien ne m’échappe. Quand je streame, j’explique les coups, je parle au chat, je lui répond, je bégaye quand je joue 4 tables, ça n’a rien à voir. Je suis beaucoup plus productif hors stream.

Est-ce que tu apprécies d’avoir une communauté de followers ? C’est important pour toi ?

Ce n’est pas important, mais je suis content que ça plaise aux gens. C’est-à-dire que je ne cherche pas à monter des followers, mais je suis ravi quand quelqu’un me dit : c’était génial, j’ai vraiment envie de jouer, j’ai appris plein de trucs, tu m’as redonné la passion. Par contre, mon nombre de followers, de viewers, ça intéresse les gens qui organisent les streams, mais pas moi.

Tu organises souvent des parties de « Marbles » pour offrir des cadeaux à tes viewers, comment cela t’es venu ?

Marbles, c’est un truc que j’ai vu en suivant le stream d’un joueur qui s’appelle ToD ; c’est Yoan Merlo, un des plus grands joueurs de l’histoire de Warcraft III, peut-être le plus grand joueur, il est français. Je suis souvent sur son stream, parce qu’on est très proches, et quand j’ai vu ça, je me suis dit : c’est génial, il faut qu’on introduise ça dans le milieu du poker et je vois que c’est repris de plus en plus et tant mieux parce que je trouve ça super fun. Quand on joue au poker, on est un petit peu gambler, et je trouve que les courses de billes, c’est le summum du gamble, et en même temps, c’est simple et drôle.

Tu as dit dans une interview que tu avais depuis longtemps le désir de faire une masterclass. Au moment de la préparer, est-ce que tu avais toi-même eu recours au coaching dans ta carrière ? Est-ce que tu avais déjà été coach pour des gens ?

Quand je suis parti vivre à Taïwan en 2017, c’était parce que j’avais rencontré quelqu’un qui s’appelle James Chen, qui jouait à l’époque les plus grosses parties de Macau, et qui m’a dit : j’ai besoin d’un partenaire d’entraînement, mais il faut que cette personne-là ne soit pas un concurrent direct. Et lui, il mettait les sous pour toutes les ressources possibles et imaginables, et on a travaillé à deux sur les nouveaux outils tels que les solvers, et en ça je dirais que c’était une forme de coaching dans le sens où lui venait des très high stakes live, moi je jouais en low stakes mid stakes, en online, et j’ai eu ce mentoring pendant toute ma progression, j’ai vu un mec qui était parti de 50 dollars et qui a monté des dizaines de millions. Il connaît le chemin, il m’a montré le chemin, et en ça je considère que c’est du coaching.

Et avant de faire cette masterclass, j’ai pris sous mon aile quelqu’un d’autre en tournois, qui s’appelle Sébastien Grax, c’est un ancien joueur de foot. Je le coache depuis septembre, ça fait huit mois. On a déjà passé des centaines et des centaines d’heures à étudier le jeu, c’est du one-to-one, et c’est la première et la dernière fois que je fais ça c’est clair, parce que ça me prend énormément de temps. C’est beaucoup de plaisir, mais c’est vraiment très prenant, c’est comme mon enfant presque : j’ai vraiment envie qu’il en sache le plus possible.

Par rapport à la partie masterclass, après que j’ai gagné mon bracelet, je voulais tout simplement arrêter le poker. J’étais trop la tête dans le guidon, j’avais gagné énormément d’argent, et je me suis dit peut-être que c’est le moment de faire autre chose de ma vie, de découvrir si je n’ai pas d’autres passions, et je voulais laisser quelque chose derrière moi, apporter à la communauté, sans partir avec toutes les connaissances que j’ai acquises et qu’elles soient perdues. En décembre 2018, je suis parti dans un projet beaucoup trop ambitieux en MTT, je voulais vraiment faire un truc de fou, 100 heures de vidéos, une masterclass pour apprendre de A à Z. J’ai commencé à la faire et au bout de 10 heures de record qui m’avait pris 50 heures, je me suis dit que c’était un projet trop important. J’avais mis le grind de côté, j’avais arrêté de travailler le jeu, et je perdais beaucoup trop de temps par rapport aux autres, et donc j’avais mis ce projet de côté et je l’avais complètement abandonné. Et puis pendant le covid, j’ai reçu de très nombreux messages m’encourageant à en profiter pour faire ma masterclass. Je me suis mis à grind online, notamment sur le .fr, et je me suis dit pourquoi pas faire ma masterclass là-dessus, pour relever globalement le niveau de jeu et faire ce que j’appelle « la méthode cash game ». C’est vraiment une masterclass très différente de ce que je voulais faire dans mon premier modèle sur le MTT : à l’époque, je m’étais lancé avec une approche très philosophique et globale du jeu. Là, c’est vraiment très exploitant, comment faire pour gagner : ça, ça fonctionne, on le fait ensemble et on vous montre que ça marche. C’est plus dans cette optique-là.

Tu considères donc que c’est plus facile de donner des conseils pour le cash game ?

Oui, les gens considèrent que le cash game est plus difficile mais aujourd’hui on voit que le tournoi est infiniment plus complexe, parce qu’il y a plein de tailles de stack différentes, on est plus ou moins proche de la bulle, il y a plus ou moins d’ICM. Le tournoi est très dur à expliquer globalement, en tout cas pour moi. Il y a de très bonnes masterclass qui sont sorties sur le .com, je pense à Nick Petrangelo, à Patrick Leonard par exemple, mais moi je n’en suis pas capable.

Lors du test de ta méthode que tu as mené sur février-mars 2021, tu as joué 125000 mains pour un gain de 47000 euros (soit 8,7 BB pour 100 mains). Tu as dit que c’était un échantillon peu important mais que tu étais prêt à prendre des paris avec qui que ce soit sur sa rentabilité à long terme. Est-ce que tu vas quand même continuer le test de ton côté ?

En ce moment, je m’occupe des gens qui ont acheté la méthode, par exemple il y a des vidéos où les gens demandent plus d’explications, donc je refais les vidéos, je passe beaucoup de temps pour le moment à faire du « service après-vente », mais je parlerais plutôt d’accompagnement autour de la méthode. Ensuite je vais être en préparation intensive pour les WSOP, et puis je continue à côté de ça mes parties de super high stakes, des parties privées sur internet qui me prennent du temps, de l’énergie. Donc pour moi, ou pour le plaisir, ou pour gagner de l’argent, je ne le ferai pas, mais si quelqu’un veut bet contre moi, je le ferai sans problème. Je trouverai le temps et les moyens. Je garantis que je fais plus de 5 BB au 100 en appliquant strictement la méthode en NL200+, sur 300 ou 400000 mains, je n’ai pas de souci à prendre n’importe quel bet à n’importe quel tarif là-dessus.

Peux-tu nous décrire brièvement le contenu de ta masterclass, et le public à laquelle elle s’adresse ?

Le contenu est très simple, c’est 4 heures de théorie, c’est volontairement extrêmement court. Il faut savoir que pour chaque heure, j’ai passé entre 3 et 4 heures à enregistrer, parce qu’en fait c’est monté, coupé, on va aux explications essentielles, il y a 5 minutes de Piosolver seulement, c’est un peu différent de ce qui se fait aujourd’hui, où dans toutes les masterclass, les mecs ouvrent des tables au Pio, ils commentent ce qu’ils voient. Pour moi, c’est vraiment : voici ce qui fonctionne, et pourquoi ça fonctionne, voici dans quel cas de figure vous devez l’appliquer. Et ça, c’est le process à chaque fois, et pendant 4 heures et sur toutes les phases de jeu. On ne va pas en détail dans la compréhension du jeu. On va dans ce qu’il faut faire pour que ça fonctionne. En fait, je donne des armes aux gens qui sont déjà rodées, et ils les appliquent, dans tel ou tel cas de figure. Ensuite, il y a 31 heures de live play, où je suis en session, j’ai 4 tables, et je commente en temps réel. Ce n’est pas un commentaire après coup, parce que c’est trop facile, tu as déjà vu la main adverse ; je commente, j’applique la méthode et je décris les difficultés que je rencontre et les explications sur mes actions.  Le fait de commenter en live fait que tu vas rencontrer les mêmes problèmes que la personne et que tu ne connais pas le résultat et donc quand tu dis qu’un bluff ou un value fonctionne très souvent, et que ça marche, tu as la récompense directe. Dans tes explications, tu ne dois pas te tromper et je trouvais l’exercice super cool parce que j’ai été mis en difficulté, je me suis pris des bad beats, les gens ont fait des hero calls face à moi et globalement sur les 30 heures, on a crush, on a gagné plein de sous, et la méthode s’est appliquée de manière très satisfaisante.

Il me reste 5 heures à faire où je vais coacher des gens qui ont acheté la méthode et on va mettre ça dans le cadre de la masterclass. Donc je commenterai leurs erreurs éventuelles et les choses qu’ils peuvent faire pour les corriger. Au total, le contenu fera 40 heures.

Tu as adapté la méthode aux salles françaises, dont le field semble démontrer des faiblesses importantes. N’as-tu pas peur que les joueurs s’adaptent et rendent de ce fait ta méthode obsolète à terme ?

C’est sûr qu’au bout d’un certain temps la méthode sera obsolète. De toute façon, c’est comme tout, le poker est un jeu où on est en permanente adaptation. Il y a 4 ou 5 ans, on disait qu’on avait atteint le summum du niveau du poker, que plus personne ne pourrait battre les tables de cash game, et depuis il n’y a jamais eu autant de nouveaux joueurs qui sont apparus avec des nouvelles façons de jouer et qui ont tout défoncé. Je pars quand même du principe que sur le .fr, le field et les pros sont très en retard par rapport au .com : une table en 5-10 sur le .fr, ça vaut une table en 1-2 sur le .com. Clairement, il y a un gap de niveau absolument immense, et c’est lié au fait que les joueurs récréatifs sont toujours les mêmes, les pros aussi, ça fait maintenant 5 ou 10 ans qu’ils jouent ensemble dans le même écosystème et les pros n’ont jamais eu besoin de s’améliorer pour gagner plus ou battre le field. Ils ont des tendances qui fonctionnent bien, mais ce sont des joueurs qui sont trop passifs et trop tight. Je ne dis pas que tous les français sont nuls : il y a des joueurs exceptionnels et il y a des joueurs vraiment très bons, mais cela représente une poignée, et généralement ils ne jouent qu’en 5-10 ou en 10-20. Mais la masterclass est destinée à des gens qui vont jouer en NL50, NL100 et NL200 et ça va leur permettre de step up et de booster leur win rate. On appuie sur les défauts principaux, le jeu tight et passif, et on met l’accent sur comment gagner de l’argent contre ces joueurs-là.

Dans ta promo, tu sembles indiquer que la rentabilité de la méthode tient au fait d’aller le moins souvent possible au showdown, pour remporter des petits pots qui vont finir par s’accumuler pour former de gros gains.

Voilà, l’idée est d’aller le moins souvent possible au showdown, et pour ça, j’explique comment il faut faire. Mais du coup, quelle est la différence entre un joueur récréatif et nous ? Parce que lui aussi, il va essayer de bluffer toutes les mains. Justement, l’idée que j’explique dans ma méthode est qu’on est face à des joueurs passifs et qui vont systématiquement commettre les mêmes erreurs, sur lesquelles on va appuyer, pour gagner ces pots-là. En revanche, sur d’autres actions, sur d’autres run-outs par exemple, lorsque notre adversaire a touché, il faut juste garder le pot le plus petit possible, ou même se coucher. Donc l’idée est de voler tous les pots que les gens ne veulent pas, et les gros pots où les gens ont les nuts ou des gros jeux, de vraiment les identifier et d’essayer de mettre le moins d’argent possible lorsqu’ils arrivent. C’est une approche qui est très différente de ce qu’on voit aujourd’hui sur le .fr, très peu de joueurs jouent comme ça.

Tu es content des premiers retours sur ta masterclass ?

Pour le moment, 60 masterclass ont été vendues, ce qui est vraiment bien, même si je n’avais pas d’espérance en termes de résultat : je suis content du contenu, et maintenant je peux mourir demain, il y aura quelque chose de moi disponible. Et les gens sont heureux, on a un Discord privé sur lequel ils échangent beaucoup. Ils ont vraiment le sentiment de progresser et que ça se passe bien, même si pour le moment, ça ne fait que quinze jours et qu’on est sur du très court terme, donc je dis à tout le monde de se calmer et d’attendre d’avoir fait beaucoup plus de mains. Il y a deux choses importantes pour moi : déjà les gens qui me disent qu’ils s’étaient mis au PLO parce qu’ils n’avaient plus de plaisir à jouer et qu’ils l’ont retrouvé avec la méthode, qu’ils ont de nouveau hâte de commencer leurs sessions : je trouve ça génial, parce qu’en plus que les membres gagnent plus d’argent, ils prennent du plaisir et ça c’est très important, surtout quand les gens veulent en faire leur métier ou en tout cas si c’est leur passion ; et la deuxième chose, c’est que j’ai joué pendant ces deux mois des joueurs professionnels de hautes limites, et parmi eux, il y en a une partie qui a également acheté la masterclass et être reconnu par ses pairs, c’est quelque chose de génial. Ils me disent, « tu fais chier, tu as dévoilé plein de trucs », c’est marrant ; ou bien « ça je ne savais pas », ou « ça j’avais un doute et ça m’a réconforté dans mon idée », et ça c’est vraiment du bonheur pour moi.

Est-ce que les échanges sur Discord, le fait de conseiller les gens, de voir leurs propres idées, apportent à ton jeu ? Est-ce que tu crées des liens avec certains d’entre eux ?

C’est marrant que tu en parles, parce qu’on se donne rendez-vous tous les dimanches pendant une heure et demie pour des reviews de mains en vocal, on en parle tous ensemble. Il y a vraiment des mecs qui ont super bien assimilé la méthode et notamment un gars qui m’a bouleversé, il a fait un play, je n’y avais pas pensé mais c’était génial. Donc la réponse est oui. Pour le moment, je suis encore beaucoup derrière eux, je réponds à toutes les questions et ils me demandent toujours confirmation, mais je pense qu’au bout d’un moment, ça ne va plus être un rapport professeur-élève, ça va plutôt être un échange et ça va être encore plus présent pour moi.

Évidemment, on crée des liens, on partage nos succès, nos défaites, on essaye de tous s’entraider, ça crée une forme de communauté, et ça me donne envie de faire une sorte d’école ou de coacher des gens et de les aider sur le long terme. La réalité, c’est que je n’ai juste pas le temps, mais il faudrait que je le fasse un jour. C’est quelque chose qui me plairait clairement parce que c’est plaisant de voir des mecs qui jouent en NL25, qui montent et qui dans 6 mois seront en NL100, etc. Le fait de transmettre est une part du bonheur et c’est peut-être le seul secteur dans la vie que j’ai suffisamment travaillé pour réussir à transmettre quelque chose.

Est-ce que tu as envie de marquer l’histoire du poker ? Et penses-tu que cela passe par d’autres résultats dans des gros tournois comme les WSOP ?

Que je marque ou pas l’histoire, ce sont les gens qui décident. En revanche, ce que je vais essayer de faire, c’est de gagner le plus de bracelets possible, mais c’est un objectif personnel. C’est peut-être la chose qui me fait aujourd’hui le plus vibrer, je vais tout faire pour. Ce qui est important lorsque tu passes autant de temps dans un domaine, c’est de ne pas seulement le faire pour toi, mais c’est aussi de le faire pour ceux qui veulent apprendre. Il y a quelqu’un qui m’a montré le chemin et ça m’a permis d’y arriver. Si je peux permettre à d’autres gens d’y arriver, ou au contraire, de leur éviter les erreurs que j’ai pu faire, je le fais naturellement.

Quant à marquer l’histoire du poker, je pense vraiment que la différence entre un inconnu et un champion, c’est 3 jours de run good. Gagner un tournoi, c’est juste avoir de la chance pendant 4 jours et rien de plus. Alors après, mettre toutes ses chances de son côté avant le tournoi, en travaillant, en se préparant, c’est le prérequis. Je le fais, mais il y a des dizaines d’autres joueurs qui le font, et celui qui gagnera le tournoi, ça sera le plus chanceux sur son run.

Contrairement à de nombreux joueurs pros français, qui préfèrent grinder là où ils sont sûrs d’avoir un edge sur le reste du field, tu sembles aimer affronter les joueurs des très hautes limites.

Je comprends leur point de vue et ce sont peut-être eux qui ont raison, si tu es dans l’optique de jouer au poker pour gagner de l’argent, tu préfères qu’il y est 5 joueurs qui soient moins forts que toi, plutôt que 3 qui soient meilleurs que toi, un qui soit à peu près pareil, et un qui soit légèrement plus faible. Je joue en NLHE jusqu’à 100-200 online sur le .com, donc je joue vraiment les plus gros joueurs ; de manière régulière, je joue la 25-50. Ce sont des limites où il y a des joueurs qui sont largement plus forts que moi et je pense que si jamais ils ne faisaient pas du poker, ils construiraient des fusées, ce sont de vraies génies. C’est le challenge de toujours être up sur ces limites-là qui me passionne, ce n’est pas gagner de l’argent. C’est vraiment toujours d’être au top niveau en cash game et d’être gagnant, même si j’ai bien conscience que je ne suis pas le plus gros gagnant dans ces limites-là. Je fais entre 2,5 et 3 BB au 100 – par comparaison, sur le .fr, dans le cadre de la méthode j’ai bien runné, j’ai fait 8,5 sans rake back mais en dehors de la méthode, quand je joue A-game, je fais du 12 ou 13 BB, ça n’a rien à voir. Ces limites sont beaucoup plus dures, mais le challenge de jouer les meilleurs, c’est aussi ce qui me fait vibrer. Aujourd’hui, malheureusement, il y a toutes ces histoires de RTA, donc je joue des parties qui sont un petit peu plus sélects, je ne vais jouer que des gens que je connais en live et dont je sais qu’ils sont éthiquement corrects. C’est possible, GG notamment le fait très bien. En mix games, en ce moment je joue une game en 800-1600, c’est une très grosse game. Alors après, j’ai fait de très grosses games à Macao, aujourd’hui j’ai un peu plus de maturité et l’excès ne me va pas. Je n’ai plus envie de faire des swings à 500k en une journée. D’abord parce que je peux mettre en péril ma bankroll et ensuite, humainement, c’est indécent. Ma mère travaille 35 heures par semaine pour gagner 1300 euros, et tu te retrouves dans des parties où son salaire mensuel, c’est une big blind, c’est ridicule. Ce n’est pas censé exister. Je joue ces parties-là parce que je peux affronter les meilleurs, mais si je pouvais les jouer en 1-2, je le ferai.

Est-ce que tu peux citer quelques joueurs qui te donnent mal à la tête ?

En tournoi, je dirais Chidwick, que tout le monde connaît ; peut-être en moins connu, il y a Michael Addamo, un Australien, qui est redoutable, et son meilleur ami, Michael Zhang. Il y a une tripotée de joueurs qui sont mille fois meilleurs que moi et qui sont vraiment impressionnants. En cash game, c’est pareil, je suis toujours époustouflé par le niveau des autres et ce qu’ils arrivent à trouver, c’est une compétition permanente, mais on se respecte beaucoup les uns les autres, on a tous plus ou moins le niveau, tout le monde a ses qualités et ses défauts, mais il y a des joueurs qui sont parfaits, du type Linus Löliger, qui est absolument époustouflant.

Tu continues de beaucoup travailler ton jeu ?

Il faut renouveler son jeu en permanence, observer ce que les autres font et ne jamais être en retard. Dès qu’une main un peu bizarre a été jouée, la première chose qu’on va faire, c’est la checker, on a des groupes de travail qui permettent de mettre ça en commun, de regarder ce que le joueur a fait, on cherche à comprendre, on passe du temps dessus. L’idée est vraiment de ne jamais rater le train qui avance.

Est-ce qu’il y a des variantes de poker que tu n’aimes pas ? D’autres que tu apprécies particulièrement ?

Je joue à tous les mix games, sauf le PLO. Je joue à quelque chose comme 25 jeux, mais pas le PLO, parce qu’aujourd’hui c’est une discipline à part entière, et généralement les tournois et le cash game sont full PLO, et du coup, je ne veux pas passer des centaines d’heures juste pour devenir un joueur moyen dans un jeu. Je vais plutôt me concentrer pour maîtriser 5 ou 6 jeux et devenir un des meilleurs dans ces variantes qui sont peut-être moins jouées.

J’adore le Deuce to Seven single draw NL, j’ai fait 3ème sur le 10k Championship RAZZ aux WSOP, j’aime aussi le Deuce to Seven triple draw, l’Omaha Hi-Lo, le RAZZ 2-7, le Badugi. Je préfère les mix games au NLHE. Il y a quelques mix games que je n’aime pas : le Limit Hold’em, le Stud Hi-Lo, et le Stud d’une manière générale.

 

 

 

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Portraits / Interviews

[Rencontre] Isabelle « NoMercy » Mercier, 20 ans dans le tourbillon du poker

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Isabelle Mercier a été l’une des figures les plus médiatisées du poker, joueuse humaine et attachante parmi les joueurs old school des années 2000. Celle qui passe la majeure partie de son temps du côté de la crypto ou à théoriser l’Open Face Chinese Poker, un format qu’elle adore depuis une dizaine d’années, revient sur sa carrière riche en émotions, anecdotes et coulisses du monde du poker sur deux décennies. Avec son co-auteur David Nathan, elle livre des « Chroniques d’une joueuse de poker passionnantes. Rencontre, depuis Las Vegas où elle vient de renouer avec les WSOP pour quelques jours.

Presque vingt ans après le succès de ton premier livre, paru chez Flammarion et écrit avec Marina Rozenman, quelle était la volonté derrière ce projet d’écriture avec David Nathan ?
C’était avant tout une volonté de revenir sur mes années poker, mais de façon ludique, à travers un format (36 chroniques) qui permettait de raconter les coulisses d’une joueuse de poker professionnelle, mais avec une certaine légèreté. David Nathan, qui a écrit beaucoup de chansons, notamment pour Garou qui est un ami commun, a très bien su trouver le ton juste pour retranscrire avec beaucoup d’humour ce que j’avais envie de raconter. 

Ce livre c’est aussi une façon de dire que je reviens sur la scène poker. C’est vrai que j’ai mis mes activités de joueuse en live entre parenthèses pendant plusieurs années, je me suis tenue loin des casinos, et je dois reconnaître que ça m’a beaucoup manqué. 

J’ai passé beaucoup de temps à travailler l’Open Face Chinese Poker, qui est devenu un de mes jeux de prédilection (NDLR: Isabelle a remporté le premier championnat du monde d’OFC format progressif en 2015) et étrangement, l’intérêt pour le No Limit Hold’em, un format que je n’aimais plus vraiment, est revenu grâce à YouTube et à la série Dans la tête d’un pro que je trouve vraiment addictive. J’ai une préférence pour les épisodes avec Adrian Mateos, de loin mon préféré. Je ne jouais plus du tout au NLHE et petit à petit, je me suis mise à refaire des tournois en ligne et en live. Je rejoue les Sunday Million de PokerStars, j’ai joué le Moneymaker Poker Tour au Playground de Montréal et je vais même parfois faire des petits tournois au casino de Wôlinak près de chez moi, un bon plan au passage pour tous les européens qui sont de passage au Québec. 

Tu viens de participer aux WSOP à Las Vegas ; quel attachement portes-tu à cette compétition ? Quels tournois joues-tu ?

C’est une banalité de le dire, mais décrocher un titre sur un WSOP est un rêve absolu, c’est un des titres les plus prestigieux du circuit avec les WPT. Las Vegas, c’est aussi beaucoup de souvenirs, ça me rappelle évidemment la période de ma vie, que j’évoque d’ailleurs beaucoup dans le livre, celle où je vivais littéralement dans mes valises, d’hôtel en hôtel. Chaque été je passais plusieurs mois au Bellagio et Las Vegas était devenue ma troisième ville d’adoption après Paris et Monaco. En ce qui concerne ces WSOP, je n’ai fait qu’un passage éclair d’une semaine, j’étais là notamment pour mon travail avec CoinPoker. J’ai joué le 1 500$ Freezeout et j’ai mis une bullet dans le Millionnaire Maker, malheureusement pas d’ITM. En revanche, j’ai pu faire du Cash Game en OFC et rien que pour ça, ça valait le coup d’être là !

Comment réussis-tu à te maintenir à jour niveau « technique » ? Qu’est-ce qui n’a pas changé, depuis tes débuts ? Quels bouleversements as-tu constaté ?

Le poker a beaucoup évolué, j’en ai bien conscience. Je ne me suis pas encore plongée à 100% dans la GTO, mais c’est un aspect technique que je veux explorer. Cela dit, je ne me vois pas devenir et une folle de la théorie et je ne veux pas que PioSOLVER soit mon meilleur ami ! J’assume être une joueuse à l’ancienne qui joue exploitant. Je fais confiance à mes lectures à table, mais je vais quand même muscler mon jeu théorique dans les prochains mois. Si Adrian fait du coaching, je ne suis pas contre! (rires). En ce qui concerne les changements et les choses qui sont restées les mêmes dans le milieu du poker, j’ai été agréablement surprise de constater qu’il y avait beaucoup moins de ce que j’appelle les Hoodie Boys, ces joueurs qui disparaissent littéralement dans leur capuche, derrière des lunettes de soleil et qui ne parlent jamais. Depuis la crise, j’ai remarqué que cette catégorie de joueurs tendait à disparaître, qu’il y avait chez les gens une envie, un besoin de se reconnecter, de plus parler aux tables notamment plutôt que de jouer au roi du silence. 

Dans ton livre, tu parles des personnes et des moments qui ont marqué ta vie de joueuse… Si tu ne devais NE RETENIR que les plus marquants, quels seraient-ils ?
Il y a évidemment mon ami Bruno Fitoussi, c’est lui qui m’a donné ma chance dans le monde du poker en m’intronisant en 1999 à l’Aviation Club de France (ACF) pour développer le club. C’est aussi lui qui m’a permis de faire mon premier tournoi à Amsterdam et c’est précisément CE tournoi qui m’a décidé à passer pro, donc je lui dois vraiment énormément. 

Gus Hansen, il a été mon mentor à mes débuts, j’ai beaucoup appris de son style agressif, à l’époque il faut se rappeler que le 3-bet et le c-bet étaient des nouveautés ! 

Impossible de ne pas mentionner Tony G, un ami de très longue date grâce à qui je suis devenue ambassadrice OFC pour TonyBet tout d’abord puis pour CoinPoker depuis 2017. C’est un joueur qui a toujours été avant-gardiste et avec une forte fibre entrepreneuriale, il m’a beaucoup inspiré. 

En ce qui concerne les moments les plus marquants, je dirais mon titre au WPT Ladies Night Out, car c’est grâce à ce tournoi que j’ai reçu de la part de Mike Sexton mon surnom de joueuse, une pensée pour lui. Autre moment gravé à jamais en moi, mais pas pour les bonnes raisons : la table finale du 5 000$ NLHE des WSOP en 2006, j’ai fait une énorme erreur en ne mettant pas Phil Hellmuth à tapis alors que j’étais en bluff. J’ai eu peur de mettre mon tournoi à risque et cette erreur me hante encore, j’étais si près d’un bracelet… J’ai pris la cinquième place. Enfin il y a eu mon titre en OFC progressif à Prague en 2015 dont je suis très fière, d’autant que la structure était… disons… assez lente, on a joué de 18h00 à 10h00 du matin, autant vous dire que je n’étais pas très fraîche pour jouer moins de cinq heures plus tard le Main Event !  

Ton livre débute par un bad beat, et sur le tilt… Comment t’es tu forgée un mental d’acier ? Est-ce que cela t’a aidé dans ta vie personnelle, hors des tables de poker ?
C’est en forgeant qu’on devient forgeron et c’est en prenant des tonnes de bad beats qu’on finit par prendre la variance avec beaucoup plus de détachement. Mais en toute honnêteté, ça m’a pris des années pour avoir un bon mental à table, pour être capable de me reconcentrer rapidement après un coup violent. C’est le principe de l’hormèse qu’on retrouve au poker : plus on est confronté à un stress mental, en l’occurrence le bad beat, plus on se renforce et mieux on le gère les fois suivantes. Cette solidité mentale me sert dans la vie de tous les jours, je gère mieux les imprévus, j’ai développé un certain stoïcisme.

Qu’est-ce qui aurait pu être mieux fait, selon toi, dans ta carrière de joueuse ? Dans l’évolution de l’industrie du poker ?
Je trouve que la structure de certains tournois pourrait être améliorée. Je ne veux pas blâmer particulièrement les WSOP, c’est simplement l’exemple le plus récent que j’ai à donner, mais le fait de devoir jouer 14h00 par jour sans pause dîner dans une salle qui fait moins mille degrés, comme c’était le cas avec dans le Millionaire Maker, c’est très intense pour ne pas dire désagréable en tant que joueur ! Quand il y avait des tournois à Paris, à l’ACF, les pause repas était de 1H30, les joueurs avaient vraiment le temps de manger et je me suis très vite habituée à ce rythme. Je trouve que les pauses dîner de 45 minutes, quand tu dois traverser le casino pour aller au resto, faire la queue pour aller aux toilettes, c’est mission impossible pour faire un vrai repas, la plupart des joueurs mangent d’ailleurs un hot-dog à la va-vite. Il y a de la place pour améliorer les structures et pas uniquement la pause dîner.

Avec le recul, penses-tu que tu étais « destinée » à cette vie de joueuse ? Raconte-nous les moments qui ont fait basculer ta vie vers le poker…
Oui je pense que c’était ma destinée. Toute ma vie, le poker n’a pas arrêté de venir me faire de l’œil. Quand j’avais sept ans, mon père et mon oncle m’ont appris les rudiments des jeux de cartes. Quand j’ai fini mon stage à la Caisse de dépôt et placement du Québec après mes études de droit, on m’a proposé un poste à temps plein, mais le même soir, Bruno Fitoussi m’appelait pour me proposer un essai à l’ACF. Je n’ai pas hésité longtemps, j’ai dit oui au poker. Quand j’y repense, je me dis que si à l’époque (internet était encore balbutiant), j’avais su qu’il existait des championnats du monde de poker, je n’aurais sûrement jamais fini ma licence de droit et j’aurais pris le premier vol pour jouer Las Vegas.

Actuellement, et ce depuis plusieurs années, tu es active dans le monde de l’écriture et de la crypto – quelles sont tes activités en 2025 ? Quels sont tes projets ?
Je suis en train de finir un livre technique sur l’OFC qui va sortir avant la fin de l’année et on est en train de faire traduire Chroniques d’une joueuse de poker en anglais pour un lancement officiel du livre à Las Vegas en décembre. En ce qui concerne le poker, je vais être plus présente sur le circuit, je veux jouer l’EPT de Monaco et d’autres tournois majeurs. Sur le plan perso, je m’occupe de mes quatre poules, de mon jardin et je regarde pour monter ma maison d’édition. Dernier point perso, je vais faire le trip de ma vie en partant en croisière en Alaska avec mes deux amies d’enfance… et nos mères ! Wow, 6 filles en bateau, je sens qu’on va avoir du fun au casino!

Si tu devais « monter » une table pour passer une soirée amicale, qui inviterais-tu, et pourquoi ?
La vraie question, c’est de savoir si je veux passer une soirée poker sympa ou si je veux que la soirée soit rentable, parce que si j’invite mes joueurs préférés, ça risque d’être une table difficile. Mais idéalement, je ferais un six-max avec David « Devilfish » Ulliott, c’est un joueur et un ami qui était un vrai personnage comme on ne les fait plus, j’adorais son côté exubérant, il me manque beaucoup. Évidemment, il y aurait Doyle Brunson à ma table. Il avait toujours tout un tas d’anecdotes poker à raconter et c’était un homme absolument adorable à table, comme en privé, c’était un des meilleurs ambassadeurs pour le poker et je n’oublierai jamais le jour où il m’a choisi en premier dans la catégorie féminine pour être dans son équipe dans le cadre de la Professional Poker League. Mon père, qui m’a appris à jouer, ferait aussi partie de ce six-max idéal et imaginaire, c’est le genre de joueur vraiment fun à une table de poker et il n’a pas peur de bluffer et d’être agressif ! J’aimerais aussi que mon personnage de fiction préféré soit à la table, c’est Johnny Lawrence (Karate Kid / Cobra Kai), tu ne peux pas t’ennuyer avec ce personnage à une table de poker, il va trash talker tous les joueurs, mais avec tellement d’humour. Impossible de parler de trash talk sans penser à Tony G qui complèterait parfaitement la table. Shuffle up and Deal !

Livre paru : Chroniques d’une joueuse de poker, éditions 21M. Disponible en français sur Amazon.

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Portraits / Interviews

Interview : Davidi Kitai, le génie à plein temps

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Nous n’avions jamais rencontré de génie dans notre vie, c’est désormais chose faite : Davidi Kitai, l’homme aux 11.5 millions de gains nous a accordé un entretien en marge du Sismix, compétition qu’il a déjà remporté lors de la toute première édition en 2014. 

  • Comment se passe le festival ? Vous restez jusqu’au 26 ? Grosse remontada hier sur le Main, non ?

Oui, je reste jusqu’au 26, tout se passe très bien, j’ai réussi à me qualifier pour le Day 2 et à monter des jetons sans avoir à re-entry. D’habitude, je re-entry un maximum pour pouvoir me qualifier, mais là, j’ai pu passer le Day 1A sans avoir à remettre la main au portefeuille, donc je vais pouvoir me prendre deux jours off.

Effectivement, j’étais descendu très bas, en passant du starting stack (50k) à 20k jetons en tout début de Day, mais on était encore assez deep donc tout est relatif. J’ai réussi à remonter  80k juste avant le dinner break, et ensuite, ça s’est très bien goupillé ! J’ai été patient, et finalement, je clôture le Day à plus de 800k.

  • Vous serez aux WSOP cette année, à quelle fréquence allez-vous jouer ?

Oui effectivement j’y serai ! Je ne vais pas tout jouer, mais quand même, je vais rester plus d’un mois, du 15 juin au 17 juillet, donc ça va être quand même assez intense. Je suis très motivé et je le sens bien cette année ! D’ailleurs, j’ai fait le break le plus important de ma carrière cette année, j’ai pris 3 mois de pause entre janvier et Mars étant donné que l’EPT Paris a été annulé, et en dehors de ça, il n’y avait pas de tournois très excitants. J’en ai donc profité pour travailler mon jeu, que ce soit la technique, mais surtout le mental ! Je me sens vraiment bien !

  • On parle souvent de vous comme étant un “joueur instinctif”. Comment définissez-vous cet instinct ? Est-ce inné ou ça se travaille ?

Je pense que c’est un peu naturel chez moi. Tout le monde a de l’instinct en réalité, mais certains l’ont plus développé que d’autres. J’ai vite compris que l’instinct, le côté psychologie, et l’analyse des tells faisaient partie de mes qualités et que je devais appuyer là-dessus pour avoir un avantage sur les autres. La plupart des joueurs de poker sont globalement plus attirés par le côté mathématique, et délaissent souvent le côté instinctif.

Enfaite, selon les personnes, je conseille parfois de ne pas trop écouter leur instinct, surtout quand je sens que ce n’est pas spécialement leur qualité. Moi je ressens quelque chose dans les décisions importantes, un instinct assez fort, alors avec l’expérience, j’essaye d’écouter cet instinct de plus en plus, surtout si j’arrive à mettre un raisonnement derrière. Parfois, on a envie de payer un bet à la river, mais ce n’est pas toujours pour les bonnes raisons, donc prudence.

  • Quel est le plus grand défi que vous ayez rencontré dans votre carrière ? Vous êtes vous déjà senti distancé techniquement par de jeunes joueurs ? Quelle adaptions avez-vous réalisées pour rester compétitif ?

Au fil de ma carrière, j’ai réalisé pas mal d’adaptations pour pouvoir rester au top niveau. La dernière adaptation a surtout été en rapport avec la GTO. Maintenant, les jeunes réussissent à rattraper très très vite le retard grâce aux logiciels et autres. À l’époque, il était impossible de rattraper le niveau d’un joueur d’expérience en si peu de temps, alors que maintenant, c’est tout à fait possible. En travaillant beaucoup, un jeune joueur peu réussir à devenir très bon techniquement.

À titre personnel, maintenant que je suis père de famille, j’ai naturellement moins de temps à consacrer au travail du jeu, en comparaison avec des jeunes joueurs qui peuvent consacrer 100 % de leur temps au poker. J’ai donc un petit désavantage face à eux de ce côté-là, mais par contre, j’ai tout de même 20 ans d’expérience en tant que joueur de poker, du coup, j’ai quand même confiance en ma technique. Le challenge est donc de réussir à optimiser mon temps, et de travailler moins, mais mieux. Je ne vais pas travailler 10h par jour, mais quand je bosse, j’essaye de travailler intelligemment.

L’année dernière, je n’ai pas fait une très bonne année, donc je me suis beaucoup remis en question. J’ai surtout travaillé mon mental avec Stephane Matheu. Le poker est un jeu très cruel, avec beaucoup de variance, donc il est absolument crucial d’être solide mentalement. Il faut accepter les coups durs et être capable de revenir sans être trop affecté, que ce soit par les mauvais résultats, ou même les bons d’ailleurs !

  • Avez-vous déjà pensé à coacher ou à écrire un livre sur votre vision du jeu ? Vous êtes quand même le joueur le plus titré d’Europe ! Vous auriez des choses à raconter !

J’y ai vaguement pensé effectivement, des gens sont venus vers moi pour me proposer des choses, mais je pense que le temps n’est pas encore venu. Je pense que ça viendra, mais en fin de carrière. Puis en dehors de ça, je pense que ça n’est plus forcément un format idéal pour transmettre de l’information. C’était plus le cas il y a 20 ans. Je partage à ma manière, en faisant du stream, des interviews, en échangeant avec les joueurs, ou même en réalisant des blogs etc…

Mon temps est important et limité, je ne peux pas tout faire, donc j’essayer de prioriser.

  • Avez-vous une routine mentale ou physique pour rester au top, notamment lors des gros tournois ?

Je n’ai jamais vraiment eu de routine, mais effectivement, avec l’âge, ça devient un peu plus dur, surtout par rapport à la concentration et à l’aspect physique. Durant le Main Event, il y a deux ans, j’avais fait Day 5 et j’ai vraiment ressenti la fatigue. J’éprouvais le besoin de me lever régulièrement et J’avais un peu mal partout physiquement. Ce sont des journées de 12h, c’est assez éprouvant !

Maintenant, j’essaye de m’imposer quelques petits exercices, même si je ne suis pas un grand sportif. Avec Stephane Matheu, j’ai pas mal travaillé pour optimiser ma concentration. J’ai appris à m’économiser et à me déconcentrer entre les mains. Il m’a enseigné des techniques qui me permettent de tenir toute une journée, et de gérer au mieux mon énergie. Maintenant, je laisse un peu passer quelques informations à la table pour pouvoir être à 100 % quand je joue une main.

  • Comment travaillez-vous votre jeu ?

J’ai un coach mental qui est Stephane Matheu, que je fréquente depuis très longtemps. On s’entretient une fois par semaine et on bosse plus la théorie. Il est très fort dans ce domaine, et il a d’ailleurs sorti un livre qui s’appelle « vous avez les cartes en main ». Il explique tout sur le coaching mental en général, et il est vraiment très très bon. Son coaching est très personnalisé, en fonction de mes besoins.

J’ai aussi un mentor, qui est un peu mon coach stratégie, qui est dans le milieu des affaires. Il m’aide beaucoup et a une vision très utile pour le milieu du poker. On sort de la technique pure, et on travaille le côté stratégique de manière globale. D’ailleurs à mon sens, cet aspect du jeu est encore très largement sous-estimé par les jeunes joueurs. Moi, j’appuie plutôt là-dessus, même si je continue de travailler la technique à ma manière, en regardant par exemple des tables finales ou en faisant un peu de solver deux ou trois fois par semaine.

Je vais par exemple essayer d’aller trouver des solutions sur des spots qui me posent problème. Je n’ai jamais eu recours à un coach technique, j’ai toujours préféré être indépendant dans ce domaine.

  • On ne vous voit pas encore sur des festivals comme les Tritons, est-ce que vous seriez tenté de les jouer dans le futur ?

À vrai dire, je ne me presse pas. Je me dis que si ça doit se faire, ça se fera naturellement. Pour l’instant, je suis à l’aise sur les buy-ins jusqu’à 25.000 €. Pour les tournois plus chers, je pourrais vendre des parts, mais j’ai un peu peur de ne pas être 100 % confortable sur ces buy-ins. Il y a 7 ou 8 ans, j’avais déjà joué ces buy-ins pendant un ou deux ans, et ça ne s’était pas spécialement bien passé, donc j’avais décidé de stopper.

Et puis il faut dire que les rendements sur ces tournois ne sont pas énormes, donc je n’ai pas spécialement envie de gamble dessus. Les organisateurs des Tritons ont annoncé qu’ils proposeraient des buy-ins un peu moins chers, donc si ça devient le cas dans le futur, je pense que j’irai les jouer plus souvent.

  • Si on devait faire un film sur votre vie de joueur, qui jouerait Davidi Kitai ? (question un peu fun pour clôturer)

Question intéressante ! Pendant un temps, beaucoup de gens disaient que je ressemblais un peu à Adrien Brody. En plus, c’est un excellent acteur ! Ce serait un honneur qu’il puisse jouer mon rôle, pourquoi pas !

 

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Portraits / Interviews

WithMyCap : le défi de la saison WiPT 2025

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A 29 ans, le Streamer Etienne Brault s’est lancé un défi sous l’œil de sa caméra : décrocher une qualification 100% gratuite au Main Event du Winamax Poker Tour. Défi relevé, et réussi, dès la première étape de la saison, à Lille ! Retour sur une aventure humaine qui n’a pas dit son dernier mot…Comment est né ce défi singulier ?

Trois raisons m’ont motivé au départ. La première : dans l’univers du streaming, le contact entre les viewers (notre public) et nous (les vidéastes) se fait surtout par écran interposé, de manière virtuelle. J’ai donc cherché un moyen de partir à la rencontre des personnes qui me suivent. Étant donné que je joue des petits buy-ins sur internet, je pense que mon audience fait en majorité partie du monde amateur. Il était donc évident pour moi que le meilleur endroit pour les rencontrer était le plus grand événement live amateur du monde : le Winamax Poker Tour. La deuxième : étant donné que je n’ai pas une grosse bankroll, j’ai rarement l’occasion de jouer en live. Je me suis donc dit que ce serait super de me lancer un défi « live » inédit : jouer toutes les étapes du Winamax Poker Tour et tenter de me qualifier sur l’une d’entre elles. De plus, j’ai streamé toutes les étapes en direct sur ma chaîne Twitch. Partager ma table, en live, sans délai, permettait à mon audience de vivre l’événement de l’intérieur. La troisième, enfin : Ma chaîne YouTube étant encore vierge, j’avais envie de créer du contenu pour la lancer. J’ai donc pensé qu’il serait sympa de réaliser un vlog par étape afin de partager mon aventure.

Comment s’est passée l’étape de Lille, où vous avez décroché tout de suite votre qualification ?

L’étape de Lille, c’était incroyable ! Déjà parce que c’était la première fois que l’équipe de streamers de la chaîne Winamax (le Streamgang) se réunissait presque au complet. J’ai passé un super moment avec eux.
Et bien sûr, c’était aussi incroyable car j’ai réussi à décrocher la qualification en passant les deux journées du tournoi sur la table télévisée commentée par PonceP et Damien.

Me qualifier dès la première étape a été un moment fort en émotions. D’une part, c’était une vraie perf’ pour moi en live. D’autre part, j’étais soutenu par toute l’équipe de streamers, ainsi que par de nombreux viewers, sur place et sur les réseaux. Enfin, mon défi WiPT ne pouvait pas mieux démarrer ! Cela m’a donné beaucoup de visibilité immédiatement et j’en garde un souvenir mémorable

Que pensez-vous de l’ambiance du WiPT ?

Je connaissais déjà le WiPT avant de lancer ce projet. Mais en le vivant de l’intérieur, comme je l’ai fait cette année, j’ai appris à le découvrir encore plus ! Les joueurs se sont qualifiés gratuitement et je pense que la majorité d’entre eux réalisent que c’est un « cadeau » que leur fait Winamax. Tout le monde est super heureux d’être là, l’ambiance à table est géniale. Pour une partie des joueurs, c’est leur première fois en live, et comme c’est du self-deal (sans croupiers), les joueurs s’entraident et apprennent parfois à se connaître. J’ai vu plein de personnes arriver seules et repartir avec des contacts, et c’est ça la beauté de l’événement. Mais l’ambiance du WiPT ne serait pas ce qu’elle est sans le staff et tous ceux qui travaillent énormément sur cet événement. Je tiens vraiment à les remercier car j’ai pu voir leur investissement de près : logistique, floors, team event Winamax, journalistes, photographes, team pro W, WIP… Et un immense merci à Jachara Ungell (Relations Presse) qui a tout mis en œuvre pour que je sois dans les meilleures conditions afin de créer mon contenu.

Comment travaillez-vous votre poker ?

Cela fait un peu plus de deux ans que je joue. J’avoue que pendant longtemps, je n’ai pas du tout travaillé mon jeu. Je me considérais avant tout comme un streamer, plus que comme un joueur de poker, même si c’était mon jeu principal sur Twitch. Mais ces derniers temps, je m’y suis mis plus sérieusement en m’entourant d’un coach : Johnny Bambou (ancien joueur pro Hearthstone, aujourd’hui joueur pro de poker ABI 40/60). Avec lui, je réalise chaque mercredi un stream sur ma chaîne Twitch, où je partage mon coaching en direct avec ma communauté. L’idée est d’aider mes viewers à progresser en même temps que moi, pour permettre à ceux qui n’auraient pas les moyens de se payer un coach de quand même apprendre et progresser.

Avez-vous d’autres idées pour amener un plus large public au poker ?

Actuellement, j’ai un autre projet en cours, que je réalise pour la seconde année consécutive en collaboration avec Winamax sur ma chaine Twitch. L’idée est d’emmener gratuitement, tous frais payés, un abonné de ma chaîne Twitch tiré au sort à Las Vegas pour jouer plusieurs tournois des WSOP ! Avec ce projet Vegas, ajouté au WiPT, mon emploi du temps est déjà bien rempli ! Mais il y aura sans doute d’autres projets à venir. J’ai déjà des idées, mais il est encore trop tôt pour en parler. Tout ce que je peux dire, c’est que chaque projet que je réaliserai sera toujours dans l’optique de partager un maximum avec ma communauté. Ce que je veux, c’est qu’à la fin de ma « carrière » de streamer, je puisse me dire que j’ai fait des choses pour les gens et que j’ai partagé ça avec eux. Pour moi, le stream, c’est du partage, et c’est ce que je veux laisser derrière moi !

Quelle est votre stratégie et vos objectifs lors de cette finale ?

Déjà, le fait d’avoir fait toutes les étapes freeroll, j’ai l’impression que je suis beaucoup plus à l’aise en live à table, avec beaucoup moins d’appréhension. J’ai moins de difficulté à compter les stacks, à gérer mes émotions. Donc ma stratégie sera simple : jouer mon jeu, donner le meilleur de moi-même à table, être concentré sur chaque main, même celles où je ne suis pas impliqué, et recueillir un maximum d’informations sur mes adversaires.

Et pour les objectifs, je crois qu’on a tous le même : gagner la finale. Je rêve de pouvoir soulever l’épée (trophée du WiPT) et la ramener dans mon set-up de stream (rires). J’ai commencé ce projet en beauté en me qualifiant dès la première étape, alors je veux le finir de la même manière !

 

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